On était des loups de Sandrine COLLETTE
Que d'émotions en même pas 160 pages, cruauté, amour, angoisse, communion et violence des hommes et de la nature, croyance en la beauté de l'âme humaine,… et plus encore, le tout servi par un style magistral, presque primitif accordé à l'ambiance de ce conte.
Comme il n'est de bonnes séances du cercle qu'avec des discussions, ce jour-là elles furent vives et passionnées.
L'écriture peut heurter avec sa quasi absence de virgules, cette façon de passer d'un parler populaire à de profondes réflexions poétiques, mais il faut se rappeler qu'on est dans la tête du héros, être frustre qu'un deuil violent va éveiller peu à peu au sentiment paternel. Dans son esprit c'est le chaos, des sentiments contradictoires s'entrechoquent, son enfance violente, traumatique ne lui a pas permis d'apprendre à être un
fils, comment pourrait-il devenir père ? L'âpreté de l'écriture se trouve alors en parfaite harmonie avec les personnages, l'environnement, les rencontres, les épreuves.
Liam, parfois excessif, mais d'une grande sensibilité, n'est pas un être lisse, s'il pense se débarrasser de son enfant c'est qu'il sait que la vie serait trop difficile pour lui et l'épisode avec « l'ogre » ou celui dans le lac sont dérangeants mais c'est ainsi, émergant de l'horreur qu'il va devenir un père.
« Le chant des loups nous appelle parce que c'est notre chant et aussi loin qu'on puisse remonter il y a l'éclat d'un animal en nous, c'est pour ça que ça m'émeut et que des larmes viennent brûler le bas de mes yeux. Ce n'est pas du chagrin c'est une émotion profonde viscérale racinaire »
Beau livre parce que plein d'espoir, où, en fait c'est l'enfant qui sauve le père en lui faisant découvrir l'amour paternel.
Les coups de coeur
* D'autres livres de Sandrine COLLETE avec le même art de se plonger dans la tête de ses héros avec son écriture magistrale que ce soit sur la difficulté à échapper à un pervers manipulateur avec Ces orages-là ou sur des enfances bafouées comme dans Et toujours les forêts et Il reste la poussière .
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Rappels : Le liseur du 6 h 27 de Jean-Paul DIDIERLAURENT un discret employé au pilon déclame dans le R.E.R des feuillets qu'il a sauvés. Plaisant et original.
Blizzard de Marie VINGTRAS, en Alaska une double disparition, haletante recherche dans un monde sauvage
Autres choses
« A voix nue » propose des podcasts intéressants, par exemple sur Marie-Hélène Lafon ou Daniel Herrero.
A venir
16 novembre : Moderato cantabile de Marguerite DURAS
14 décembre : Plus haut que la mer de Francesca MELANDRI
Autour du cercle
C'est certain, si les Rencontres de Moguériec sont reconduites en 2024, ce sera à Carantec, à la grande déception du cercle de lecture.